Histoires de fruits des bois et de caca

Voilà un fruit que tout le monde connaît, et que beaucoup aiment, ne serait-ce que dans les yaourts aux fruits du commerce. Et beaucoup d'animaux sauvages les adorent aussi! Mais pourquoi les plantes fabriquent-elles des fruits, si c'est pour qu'ils soient mangés?

La mûre n'est pas le fruit du mûrier. Enfin, pas cette mûre-là, qui est celle que l'on mange à la fin de l'été et que l'on trouve dans tous les yaourts et desserts à la mûre. Elle est le fruit de la ronce, dont il existe quelques variétés cultivées qui donnent de gros fruits, en abondance. Mais les fruits des ronces sauvages sont déjà déliceux, et très appréciés d'autres animaux que l'humain! Entre les oiseaux, les rongeurs, ou même des carnivores comme la fouine ou le renard, friands de fruits des bois, la mûre a toutres les chances de se faire boulotter! Il faut dire aussi qu'elle est appétissante. Juteuse, sucrée, parfumée, comment résister?

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Mais... Attendez une minute! Dans la mûre, il y a les graines de la ronce, si ces graines sont mangées par des prédateurs, alors la ronce n'aura aucune descendance! Dans ce cas, pourquoi est-ce que les ronces fabriquent ces mûres appétissantes? Si une ronce mutante apparaissait, qui fabrique des graines nues, sans ce fruit juteux autour, n'aurait-elle pas plus de chances de toucher le sol pour germer?

Et bien, oui, elle toucherait peut-être le sol, mais elle ne ferait que tomber de sa branche sous sa mère et en compétition avec des centaines de frères et soeurs (la ronce est hermaphrodite, donc cette notion de frère ou soeur n'est donc pas franchement pertinente). De ce tapis de graines, est-ce qu'une seule petite pousse arriverait à survivre? Non, pour avoir la moindre chance de donner une ronce bien portante, la graine doit voyager et tomber le plus loin possible de la plante-mère (qui n'est pas forcément la plante-père, puisque chez les plantes hermaphrodites existent souvent des mécanismes pour empêcher l'autofécondation et favoriser la diversité génétique).

Les pissenlits ont fabriqué des aigrettes légères qui volent dans le vent. Les érables misent sur des ailes volantes. Et la ronce? Elle fait de l'animal-stop. De l'intérieur. Ses graines résistent aux sucs gastriques de beaucoup d'espèces : si elle est avalée toute ronde, elle ressortira donc en bon état, prète à germer, dans un caca qui donnera de l'engrais en sus!

La mûre est donc "faite pour être mangée", même du point de vue de la plante. Il en est de même pour toutes les plantes qui fabriquent des fruits riches en sucre, parés de belles couleurs, qui attirent toute une variété d'animaux, lesquels vont disperser les graines aux quatre coins de leurs territoires. C'est une coévolution : les animaux en mangeant les fruits les plus sucrés sélectionnent le taux de sucre et de nutriments, négligeant les autres, les plantes sélectionnent les animaux capables de discerner les couleurs de leurs fruits ou leur odeur, dont elles se servent pour les attirer.

Attention tout de même, cela ne signifie pas que toutes les baies et tous les fruits soient comestibles par l'homme: certains ne sont consommable que par certaines espèces, mais toxiques pour les autres (hypothèse personnelle : peut-être pour éviter les masticateurs qui détruiraient les graines en les mâchant ou ceux dont les sucs digestifs ne sont pas adaptés, trop corrosifs, à vérifier!)

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